Les déductions fiscales à l'impôt des personnes physiques : la fin d'une époque

Depuis quelques années, nos dirigeants nationaux et régionaux réduisent de plus en plus significativement les déductions fiscales.

La première mesure que nous soulignons est la réduction d’impôts fédérale pour toutes les dépenses permettant d’économiser l’énergie, qui fut supprimée à partir de l’exercice d’imposition 2014 (c.-à-d. pour les dépenses payées en 2013) sauf celle pour l’isolation de la toiture. Finis les incitants fiscaux liés aux investissements dans du double vitrage, dans de nouvelles chaudières, de nouveaux panneaux photovoltaïques ou dans un audit énergétique.
On connaît la triste fin subie par les PME qui s’étaient développées dans ces secteurs, fortes du know-how de jeunes ingénieurs qui ont dû se reconvertir malgré leurs compétences pointues.

Pire encore, la loi du 13 décembre 2012 portant des dispositions fiscales et financières a transformé l’avantage fiscal en une réduction d’impôt pour toute une série de dépenses. La réduction d’impôt se déduit donc de l’impôt à payer et non de la base imposable.
A première vue, la mesure qui permet d’obtenir directement une diminution de l’impôt à payer semble séduisante. En réalité, elle pénalise tous les ménages ayant des revenus supérieurs à 37.870 euros pour l’exercice d’imposition 2016.
Partons d’un taux marginal de l’ordre de 54 % (additionnels compris), l’écart entre la nouvelle réduction et l’avantage résultant d’une déduction fiscale de la base imposable au taux marginal est de l’ordre 22% pour les déductions remplacées par une réduction d’impôt de 45% et de 5,5% pour les déductions remplacées par une réduction d’impôt de 45%. On assiste donc de manière évidente à un alourdissement de la charge fiscale.

Depuis l’exercice d’imposition 2016 (sixième réforme de l’Etat oblige), les Régions ont pris leurs propres initiatives en matière de « réductions d’impôt transférées ». Et d’en profiter au passage pour augmenter la pression fiscale : en Flandre et en Wallonie, les réductions d’impôt relatives aux dépenses destinées à sécuriser une habitation contre l’effraction ou le vol sont supprimées.

La Région wallonne limite très fortement les avantages relatifs aux titres- services. Le Gouvernement wallon a fait tomber l’avantage fiscal de 1410 EUR maximum à …135 euros.
La Région de Bruxelles, par une Ordonnance du 18 décembre 2015, plafonne la réduction d’impôt à 211,50 euros par contribuable pour de tels titres-services. A Bruxelles, cinq autres réductions d’impôt sont supprimées à partir de l’exercice d’imposition 2017.


L’IMMOBILIER : UNE BRIQUE DANS LE VENTRE DURE A DIGERER

En matière de fiscalité immobilière et de réductions d’impôt liées aux emprunts hypothécaires, la stratégie du législateur est de compliquer au maximum. Le contribuable sue tellement pour remplir sa déclaration qu’il ne se rend pas compte qu’il ne déduit presque plus rien. C’est une stratégie comme une autre : le décret de la Région Wallonne du 2 juillet 2016 relatif à l’octroi d’un avantage fiscal pour l’acquisition de l’habitation propre instaure le Chèque Habitat.

Le chèque habitat, véritable chèque en bois, concerne les contrats d’emprunt hypothécaire conclus à partir du 1er janvier 2016 (exercice d’imposition 2017). Il enterre à jamais la fameuse déduction pour habitation propre et unique :

Contrairement au régime antérieur, seules les acquisitions d’immeubles donnent encore droit à la rédaction d’impôt, à l’exclusion désormais des travaux de rénovation ou de transformation (Encore une belle marque de soutien à un secteur en péril dans des régions où la rénovation de l’habitat est pourtant un enjeu économique et sociétal…).

De plus, la réduction d’impôt n’a plus qu’une durée limitée de 20 ans et est réduite de moitié après 10 ans.

En outre, la réduction d’impôt est aussi réduite de moitié dès l’année où le contribuable a la très mauvaise idée d’acquérir un second immeuble,

Enfin le pire de tout : les montants des avantages, (qui pour l’exercice d’imposition 2016, pouvaient atteindre 3130 euros par contribuable) font une chute significative et se déterminent désormais comme suit :
1° lorsque le revenu imposable de la période imposable n’excède pas 21.000 euros, la réduction d’impôt est égale à 1.520 euros (qui devient le nouveau maximum) ;
2° lorsque le revenu imposable de la période imposable est supérieur à 21.000 euros sans excéder 81.000 euros, la réduction d’impôt est égale à 1.520 euros diminués d’un montant équi¬valent à la différence entre le revenu imposable et 21.000 euros multipliée par le coefficient de 1,275 pour cent.

Le chèque habitat est donc un chèque à bêtas, comme le dit justement Me Coppens dans un remarquable article paru récemment dans la revue de l’OECCB.
 
Dans ce rapide descriptif incomplet de la diminution de nos avantages fiscaux, il faut aussi mentionner la hausse du précompte mobilier de 15 % à 27% (bientôt 30% ?), la taxation des bonis de liquidation (jadis inexistante), la taxe irréfléchie sur les plus-values spéculatives boursières, l’explosion du montant des avantages de toute nature pour utilisation de voiture de sociétés ou pour occupation d’immeubles en société, etc.

Quelle est la logique derrière tout cela ?

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